Gaïa devait être euthanasiée le 8 mars sur volonté de sa propriétaire. Elle a pu être placée dans une famille d’accueil bénévole pour éviter cela et être prise en charge.
Avant d’être prise en charge, elle n’a vu le vétérinaire une seule fois dans sa vie, pour sa stérilisation à ses 6 mois. Elle n’y est jamais retournée depuis. À 10 ans, elle a été abandonnée car elle était “devenue agressive”. Elle n’a pas été abandonnée parce qu’elle n’était pas assez câline, mais elle a été câlinée quand elle ne le voulait pas pendant des années… Et ces contacts non consentis ont mené Gaïa à monter d’un cran pour manifester son refus des caresses. Elle a alors commencé à avoir des conduites agressives envers sa propriétaire.
Gaïa n’arrivait pas à faire comprendre son absence de consentement. Elle s’est donc mise à lancer les griffes pour stopper ou désamorcer les interactions qu’elle ne désirait pas. Les choses escaladant – car Gaïa a reçu des coups de pied en retour – Gaïa en venait à attaquer “sans raison apparente” lors d’un croisement dans un couloir par exemple. Nous parlons bien ici de conduites agressives : ce sont des conduites (= une manière de se comporter). Gaïa n’a jamais été (et ne sera jamais) un “chat agressif”. Parce que tout simplement, “agressif” n’est ni un trait de personnalité, ni un caractère. C’est pour cela que nous n’utilisons pas le terme de “chat caressé-mordeur” que l’on retrouve beaucoup. S’il faut donner une expression pour poser des mots sur ce qu’il s’est passé, nous préférons le terme (récemment introduit par Sonia Paeleman, comportementaliste) d’”humain caresseur-mordu”. Car, en définitive, Gaïa s’adaptait comme elle pouvait, quand sa propriétaire aurait pu mettre en place le nécessaire pour que Gaïa vive mieux son quotidien.
Nous sommes intervenu·es pour prendre Gaïa en charge et la placer chez une merveilleuse bénévole formée au comportement félin qui a pu l’accompagner. Nous avons laissé à Gaïa le temps nécessaire pour (1) accuser le coup de l’abandon et des émotions fortes de toutes parts qui ont marqué cet événement, (2) tolérer la cohabitation avec une humaine en ayant peur d’être contrainte et touchée, (3) comprendre que l’humaine respectait ses limites et était à son écoute, (4) nous dévoiler sa personnalité et ses préférences. On ne parle pas ici de “rééducation” ou de “changer” Gaïa, car elle n’est ni “malade”, ni “mal éduquée”. Nous parlons bien de lui laisser le temps et l’espace qui lui conviennent pour être à l’aise dans son quotidien et ne plus avoir besoin de recourir à des comportements d’adaptation (ici des conduites agressives) pour gérer les difficultés qu’elle éprouve dans son quotidien.
Et bien… Gaïa n’a jamais eu de conduite agressive dans sa Famille d’Accueil, mais elle a eu un langage corporel très clair. En effet, notre bénévole étant à l’écoute de ces signaux, Gaïa n’a jamais eu besoin de s’imposer par la force. Après une période de méfiance envers les intentions de sa FA, et une forte hésitation sur les premiers câlins, le travail d’accompagnement étape par étape a permis à Gaïa de devenir une chatte sereine dans ses interactions. Très concrètement, les étapes ressemblent à ça (sur plusieurs semaines) : ne pas la toucher, puis laisser sa main balloter pour qu’elle s’y frotte d’elle-même, puis 1 caresse, puis 2 caresses, puis un câlin de 30 secondes, puis 1 minute.., etc. Chaque interaction a montré à Gaïa que ça pouvait bien se passer, et que l’humaine en face était à l’écoute, alors, elle a repris confiance…
Alors qu’on aurait pu imaginer une chatte distante qui aime son espace et tolère les caresses ponctuelles (ce qui aurait été parfaitement ok évidemment, chaque animal a ses préférences et ne doit pas subir les injonctions des humains qui le veulent comme ceci, ou comme cela) … C’est une toute autre Gaïa qui se présente à nous aujourd’hui ! Une chatte pot de colle, très câline.. et joueuse (chose qu’elle n’avait jamais fait de toute sa vie). Elle n’aime toujours pas être surprise, mais si c’est le cas, elle ne sort pas les griffes et préfère signaler son inconfort par un miaou absolument trop trognon. Elle gère désormais assez bien ses émotions, elle vient par exemple de vivre un déménagement, sans que cela ne la perturbe particulièrement.
Elle est merveilleuse… et elle n’attend plus qu’une famille où poser ses valises pour le reste de sa vie.